Des minéraux pour étudier le changement climatique
28 Mars 2012 | Par Bruno Scala | Actualités
Un nouvel outil pour étudier le changement climatique : le minéral l'ikaïte.
L'ikaïte, un minéral composé de carbonate de calcium et d'eau, se révèle très intéressant pour étudier les variations du climat. Grâce à cet outil, des scientifiques viennent de montrer que les variations climatiques du dernier millénaire auraient eu un impact jusqu'en Antarctique, alors qu'on pensait qu'elles n'avaient touché que l'hémisphère nord.
Discipline difficile, la paléoclimatologie repose sur l'étude d'indicateurs, que les scientifiques appellent proxy. Parmi eux, un minéral, l’ikaïte, se révèle précieux. Il vient d’ailleurs d’apporter de nouvelles informations concernant l’optimum climatique médiéval (OCM) et le Petit Âge glaciaire (PAG) : ces deux périodes de forte variation climatique auraient eu un impact jusqu’en Antarctique.
L’OCM correspond à un réchauffement climatique en Atlantique nord qui s’est déroulé du Xe au XIVe siècle environ. Le PAG, qui a suivi, du XVIe au XIXe siècle, s’est fait remarquer par des températures froides. Ces deux périodes sont très importantes pour les climatologues car leur étude permet de dégager de nombreux indices concernant l’évolution du climat à notre époque.
L'ikaïte emprisonne de l'eau à basse température
Dans la revue Earth and Planetary Science Letters, des scientifiques américains et britanniques expliquent comment ils se sont servis d’un nouvel indicateur pour obtenir des informations sur ces époques. Il s’agit de l’ikaïte, ou carbonate de calcium hexahydraté (CaCO3-6H2O), un minéral aux propriétés peu communes : dans l’eau, il n’est stable qu’à des températures très froides. Et lorsqu’il se stabilise, il enferme des molécules d’eau au milieu de carbonate de calcium (CaCO3). En revanche, au-delà de 4 °C environ, il libère les molécules d’eau.
Les scientifiques ont réalisé des carottages sur la péninsule de l'Antarctique.
Les points de prélèvement sont marqués avec un losange noir. © Lu et al. 2012 Earth and Planetary Science Letters
Si bien qu’en analysant le ratio des isotopes d’oxygène contenus dans les molécules d'eau de l’ikaïte, on peut avoir une idée précise des variations climatiques de l’époque. Les cristaux d’ikaïte se forment au fond des océans, à la surface de la couche sédimentaire et permettent ainsi d’obtenir des informations concernant la température de ces zones.
Lors des périodes de refroidissement, les molécules d’eau portant l’isotope 16 de l'oxygène (16O), qui sont en surface, glacent préférentiellement et l’isotope 18O des eaux profondes, qui entre dans la composition de l’ikaïte, devient donc plus abondant. Ce sont ces données que les chercheurs ont collectées sur des échantillons prélevés au niveau de la péninsule de l’Antarctique.
L'Antarctique touché par les événements climatiques du dernier millénaire
Et leurs résultats sont sensiblement en contradiction avec ce que les scientifiques pensaient concernant l’optimum climatique médiéval et le Petit Âge glaciaire qui a suivi. Jusqu'à présent, les données disponibles ne permettaient pas de dire que ces variations avaient été ressenties au-delà de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Mais les analyses de l’ikaïte de l’Antarctique indiquent que le pôle Sud a également été affecté par ces événements.
Outre ces informations inédites sur le climat du passé, ces travaux introduisent une nouvelle méthode fiable permettant d’obtenir des détails sur les variations de température des océans. Une aubaine pour les chercheurs qui, en plein débat sur le changement climatique, cherchent constamment à comprendre et décrypter les variations du passé.
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Par Bruno Scala
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